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7 décembre 2013 6 07 /12 /décembre /2013 18:00

 

 

La soupe de crabes

 

 

Aujourd’hui mon mentor commence par m’apprendre à saisir les crabes qui sont nombreux et de comportement varié. Pour ceux d’entre eux qui se laissent approcher, tandis que la paume de la main plaque et immobilise la luisante carapace, le pouce et le majeur vont précautionneusement bloquer les pinces ; inoffensive la "cranca" n’a d’autres ressources que de baver sa rage ou sa crainte en roulant des yeux exorbités.

 

 

crabes-plages.jpg


          Il me faut surmonter mon dégoût et subir la violence car le crabe le plus mollasson fait preuve d’une étonnante vivacité quand il se sert de ses pinces. Dans l’abnégation la plus totale, j’inaugure à ce moment là le  dur apprentissage qui devait faire de moi " un vrai garçon comme les autres !"

- La nuit ils dorment et c’est beaucoup plus facile, pontifie Tarambana, non seulement ils ne bougent pas quand tu approches la main mais ils ne pincent pas quand tu les saisis.

- Et comment tu les voies ?

- On emmène la lampe à acétylène...

 

          J’ai déjà vu une telle lampe dans notre cabanon, une sorte d’obus balançant au bout d’une longue anse de fer, dont Pépico est le seul à maîtriser la redoutable alchimie.

          Lorsqu’à quelque temps de là mon oncle décide " d’aller se faire une soupe de crabes la nuit prochaine", je n’ai pas trop de toute ma séduction pour le décider à me laisser les accompagner,  lui et  José son habituel compagnon d’équipée.

- Vous restez tout près de moi pour bien voir les crabes mais surtout regardez où vous posez les pieds, dit Pépico qui tient la lampe allumée et un catcharo de fer blanc pour mettre les prises.

          Bien entendu c’est à moi qu’il s’adresse, mon copain lui a maintes fois donné la preuve de son aisance et de sa dextérité. Effectivement les crabes sont là, nombreux et immobiles, petits joyaux sombres et légèrement luisants sur la roche un peu plus foncée. Nos rires et nos bavardages ne les font pas fuir, il n’y a qu’à les cueillir et tendre le bras pour les accumuler dans le bidon tendu par mon oncle.

          De temps en temps, au lieu de rencontrer la rigide carapace, les doigts s’enfonce comme dans de l’éponge :

- Les crabes mous, a prévenu Pépico, vous me les donnez à part.

          Et José m’explique qu’ils font d’extraordinaires appâts pour pêcher les gros poissons.

          Puis il ajoute :

- Mais il faut les utiliser dès le lendemain car sinon la carapace redevient dure et c’est foutu.

          Ce fut une merveilleuse soirée mais la soupe de crabe qui s’ensuivit ne justifia pas du tout le mal qu’elle donna pour la faire.

 

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